Athènes Brule !!!

Publié le par Elias

ATHÈNES (AFP) – « Laissez passer les secours ! ». Les brancardiers de la place Syntagma se fraient un chemin entre lanceurs de pierre et forces anti-émeute près du parlement grec. Un nuage de gaz lacrymogène les enveloppe. Quelques rues plus loin, les fenêtres d’un magasin crachent des flammes.



À Athènes, la somme des exaspérations s’est muée dimanche soir en rage inextinguible contre l’impasse économique et politique du pays. Un climat de guérilla urbaine d’une rare intensité a saisi la capitale grecque.

En contrebas du parlement où les députés débattent des mesures d’austérité réclamées par les créanciers du pays, un bruit de maillet scande les slogans protestataires : un homme, le visage dissimulé, fait sauter le marbre des escaliers de la station de métro pour se constituer des munitions.



 




Les devantures des grands hôtels, des boutiques du centre-ville subissent le même sort, selon une technique devenue rituelle lorsque les manifestations qui rythment le quotidien de la Grèce depuis deux ans prennent un tour houleux.

Dans les rues qui entourent la place Syntagma, de petits groupes de manifestants casqués ou cagoulés avancent vers les forces anti-émeute. Les pierres volent et rebondissent sur les boucliers transparents.

Un pas en avant, deux pas en arrière, les gaz lacrymogène tirés en riposte font reculer les assaillants et tous les manifestants qui se tenaient en retrait. Course folle dans les rues adjacentes pour échapper au nuage blanc qui attaque le nez et brûle les yeux. En espérant ne pas se trouver pris en tenaille avec d’autres affrontements.

Le passage des brancardiers aux vestes rouges qui viennent secourir un homme à bout de souffle provoque les applaudissements de la foule. « Laissez passer les secours ! », lancent-ils à l’adresse des protestataires comme des forces de l’ordre.

Selon le ministère de la Santé, 54 blessés ont été dénombrés au cours de la soirée.





Au pied du parlement, où les manifestants affluent et refluent par vagues, en fonction des heurts, un homme s’époumone au mégaphone : « avancez, remplissez la place, ne vous laissez pas intimider. Ce soir, envoyons au monde l’image de la dignité du peuple grec ! »

Au fil de la soirée, la place se vide mais la foule reste dense dans les rues voisines où les incidents se déplacent avec une intensité rarement atteinte dans les mobilisations précédentes : pas moins de quinze bâtiments étaient en feu en milieu de soirée.

Selon des photographes de l’AFP, des manifestants ont fait usage pour la première fois de pistolets lance-flamme et de bombes incendiaires, en plus des habituels cocktails molotov.

Visibles à plusieurs centaines de mètres, les flammes qui ravagent un magasin jouxtant l’un des plus anciens cinémas d’Athènes déchirent l’obscurité. Les pompiers ont du mal à se rendre sur les lieux des sinistres en raison du nombre de gens dans les rues.

Un vélo slalome entre les morceaux de marbre blanc et les débris noircis qui tapissent une artère centrale. En l’air au milieu de la rue, un téléphone décroché se balance au bout d’un câble.




Athènes : les manifestations dégénèrent, une dizaine de bâtiments en feu
Une dizaine de bâtiments vides étaient en flamme dimanche soir dans le centre d’Athènes, incendiés pour la plupart par des jets de cocktails molotov en marge des manifestations anti-austérité, ont indiqué les pompiers.





« Une dizaine de bâtiments sont en flammes, dont la plupart par des cocktails Molotov », a indiqué à l’AFP Nikolaos Tsongas, porte-parole des pompiers selon lequel les véhicules de pompiers ne peuvent pas s’approcher des lieux des sinistres en raison du nombre de gens dans les rues.

Dans la rue Stadiou, un bâtiment d’un étage, siège d’un magasin de cristaux de luxe et le cinéma voisin brûlaient encore vers 19H45 GMT malgré l’intervention de deux brigades de pompiers, a constaté un journaliste de l’AFP. Le magasin à l’enseigne Kosta Boda, voisin d’un cinéma, brûlait depuis une heure lorsque les pompiers sont arrivés vers 19H00 GMT.



Le toit en céramiques s’est effondré, les flammes passant au dessus et gagnant le cinéma Attikon, un des plus connus de la ville.

Dans la soirée, la rue Stadiou où se trouve le magasin en feu et le cinéma, qui part de la place Syntagma, a été le théâtre d’affrontements entre la police et des groupes de manifestants. Le sol de la rue est jonché de bouts de marbre utilisés comme munitions par les manifestants.






Premiers incidents dès l’après-midi

Les premiers incidents ont éclaté quand des groupes de contestataires ont fait pression sur un cordon des forces anti-émeutes devant l’esplanade du soldat inconnu, en contrebas du parlement, selon les images en direct du site internet Zougla.

Près d’une heure après le début du rassemblement, à 18H00 heure locale (16H00 GMT), la police évaluait le nombre des manifestants à quelque 25’000. Une estimation pouvant laisser augurer, si l’afflux se poursuivait, d’une très importante mobilisation rappelant celle des grands sursauts contestataires de juin et octobre, lorsque 50’000 à 100’000 personnes s’étaient massées sur la place Syntagma.

En début de soirée, on estimait, toujours de source policière, qu’environ 80’000 personnes ont manifesté à Athènes et 20’000 à Salonique.

Dans la foule, repliée sur le bas de la place, les syndicalistes côtoyaient jeunes aux cheveux ras brandissant des drapeaux grecs, militants communistes et sympathisants d’extrême gauche, dont beaucoup portaient des masques pour se protéger des gaz irritants.






« Un vote crucial, l’un des plus difficiles de l’histoire »


Le président du parti de droite Nouvelle Démocratie, Antonis Samaras, a appelé dimanche les députés grecs à voter en faveur du paquet d’austérité, malgré les violentes contestations qui embrasent les rues d’Athènes.

« Le vote est déterminant et crucial, c’est l’un des plus difficiles de l’histoire » a dit M. Samaras à la tribune du Parlement, devant lequel des affrontements sporadiques entre manifestants anti-austérité et forces de l’ordre se poursuivaient dimanche soir.

La Nouvelle Démocratie est le seul participant à la coalition gouvernementale aux côtés du Pasok (parti socialiste) après le retrait du Laos (extrême-droite), vendredi, en réaction aux mesures.

Le premier mémorandum d’accord entre la Grèce et ses créanciers (UE et FMI) en mai 2010 était une « recette erronée » a dit M. Samaras.

En mai 2010, un premier mémorandum d’accord entre la Grèce et ses créanciers (UE et FMI) accordait à la Grèce un premier prêt de 110 milliards d’euros en échange de mesures d’austérité et d’assainissement budgétaire. Il a contribué à sauver la Grèce de la faillite jusqu’à présent et à maintenir le pays dans la zone euro, mais sur le plan intérieur, il a aussi débouché sur une aggravation de la situation économique.

« Mais actuellement la dette n’est pas viable, et aujourd’hui notre maintien dans la zone euro est mis en cause, nous sommes menacés de faillite », a-t-il ajouté.

« S’il y a une banqueroute incontrôlée, nous allons vivre dans la terreur, pour éviter le gouffre, je vous appelle à voter le nouveau prêt et changer les politiques actuelles, mais pour changer il faut éviter le gouffre et assurer la survie du pays » a-t-il dit.






Alors que le nouveau plan d’austérité que veut imposer le gouvernement prévoit une baisse de 22% du SMIC, la réponse sur un mur d’Athènes : "Avec 400 € par mois tu ne vis pas, tu te soulèves !"

Le ministre des Finances brandit le spectre d’une « faillite » du pays

À l’intérieur du parlement, dont les abords étaient gardés par quelque 3000 policiers, les discussions battaient leur plein, marquées par de fréquents incidents de séance entre les rangs gouvernementaux et l’opposition de gauche.

« D’ici à dimanche soir, le parlement doit avoir adopté » le nouveau programme de redressement, sous peine sinon d’une « faillite » de la Grèce, a lancé, visiblement tendu, le ministre des Finances, Evangélos Vénizélos.

Il a souligné que l’Eurogroupe, qui pourrait se réunir mercredi, réclamait cet aval en préalable au déblocage du deuxième plan de sauvetage du pays, combinant renflouement via des prêts publics de 130 milliards d’euros et désendettement via l’effacement de 100 milliards d’euros de créances.

Le pays espère entamer cette dernière opération avec ses créanciers privés d’ici au 17 février, a précisé M. Vénizélos. Le représentant des créanciers privés, Charles Dallara, a lui aussi appelé les députés à voter oui, et prévenu que la Grèce n’avait plus une minute à perdre, dans un entretien avec le quotidien Kathimérini.







Pour le Premier ministre, c’est le plan de sauvetage ou le « chaos »

Le Premier ministre Lucas Papademos avait aussi averti samedi que la Grèce jouait sa survie financière et son maintien dans l’euro, pour empêcher le « chaos ».

Son gouvernement de coalition socialiste-conservateur dispose d’une majorité théorique de 236 députés sur 300, qui pourrait être réduite par une vingtaine de dissidences annoncées ou présumées, mais sans qu’un rejet ne soit dans l’immédiat jugé probable.

Sans cet aval, la Grèce n’a aucune chance de recevoir le moindre centime d’aide pour éviter un défaut de paiement incontrôlé en mars, à l’échéance de créances de 14,5 milliards d’euros.

Les dirigeants socialistes, Georges Papandréou, et conservateur, Antonis Samaras, ont également prévenu leurs députés que tout écart vaudrait exclusion, à un moment où la dureté de la cure prescrite craquelle le système politique.

Le plan ouvre notamment la voie à une chute brutale des salaires dans le privé censée redonner de la compétitivité au pays.



 






Pour les syndicats on creuse le « tombeau de la société »

La Grèce « à l’heure du jugement », titrait Kathimérini, tandis que To Vima (centre-gauche) estimait que le pays était secoué par un « séisme » mettant « politique, économie et société en morceaux ».

Les syndicats ont jugé que ce plan faisait le « tombeau de la société », tandis que la gauche communiste et radicale a réitéré au parlement sa demande d’élections immédiates, considérant que la Grèce n’a rien à perdre à mettre ses créanciers au défi de la lâcher.

Entravée par le débrayage des transports, la mobilisation avait été limitée à l’occasion des premières manifestations qui ont rassemblé jusqu’à 20’000 personnes en marge de grèves générales mardi, puis vendredi et samedi.

Les députés devront se prononcer pour un texte qui prévoit notamment un abaissement de 22% du salaire minimum, ramené à 586 euros brut sur 14 mois, la suppression dans l’année de 15’000 emplois publics et de nouvelles coupes dans certaines retraites.

Le vote portera aussi sur les modalités du programme d’échange d’obligations avec les créanciers privés pour réduire la dette souveraine à 120% du PIB d’ici à 2020, ainsi que sur le schéma de recapitalisation des banques grecques.

L’accord gouvernemental affiché jeudi sur ce plan s’est vite fissuré, avec la démission dès le lendemain de six membres du gouvernement : deux socialistes et quatre cadres de la formation d’extrême droite Laos, qui avait rallié en novembre le gouvernement de coalition.

 

 

 

 


 

 

 

 

Alors que nous écrivons ces lignes, la ville brûle toujours et les combats continuent dans la zone d’Exarchia et de Monastiraki, tandis que la police anti-émeute a repris le reste de la ville où patrouillent sans merci des flics-motards et des colonnes de voltigeurs Delta qui font la chasse aux pillards.



Athènes a vécu un soir d’insurrection.

Un, deux, trois millions de personnes ont pris les rues et ont livré bataille, très dure et de grande ampleur, pendant plus de sept heures face à une armée de flics qui quadrillent la ville en ce moment et sécurisent militairement le Parlement.

Pillages, incendies, barricades enflammées, bombes, cocktails Molotov, le chaos de la révolte s’est substitué au chaos de la misère.



Toute la journée la ville fut étrangement calme, silencieuse, vide, en particulier à Exarchia, sous une pluie diluvienne. Exarchia fut totalement encerclé par des centaines de voltigeurs Delta et la fac de Droit, bastion des anarchistes révolutionnaires, fut assiégée par des centaines de MAT en tenue de combat. Plusieurs dizaines d’arrestations préventives furent à déplorer tandis que la police bloquait toutes les stations de métro menant à Syntagma.

À partir de 16 heures, un soleil flamboyant et chaud baigne de nouveau les rues de lumière et, presque instantanément, le peuple sort. Par centaines, par milliers, par centaines de milliers, finalement par millions. Des foules entières bloquent systématiquement tous les carrefours. Les avenues se vident de toute circulation pour laisser place à une masse populaire incalculable.

17 heures, les combats commencent à Syntagma face au Parlement.

La bataille révolutionnaire du peuple durera dès lors jusque 23h30. Les informations précises manquent encore, mais il semble qu’il n’y ait pas de mort.



Est-il nécessaire de se donner la peine de toute façon vaine de tenter de « décrire » un soir d’insurrection ? Des bâtiments entiers ont brûlé, par plusieurs dizaines, dans tout le centre d’où montent encore les épaisses colonnes de fumée noire. De grandes banques la plupart du temps, des boutiques de luxe et autres carcans du Capital. Un théâtre aurait brûlé, la bibliothèque nationale également, cela n’est ni bien ni mal, a été fait ce qui devait être fait. D’après nos premières infos, il y aurait eu au moins cinq grandes zones de combat à travers toute la ville. En ce qui concerne le front parmi les plus violents de l’artère entre la place Omonia et la place Syntagma, les combats furent terribles. De nombreux blessés graves, crânes ouverts par des éclats de grenade, au sol asphyxiés, que les combattants ramassaient et traînaient à l’arrière avant d’arrêter l’une ou l’autre ambulance qui dévalaient en trombe parmi la foule révolutionnaire. Une quinzaine de barricades enflammées furent dressées sur à peine deux ou trois kilomètres d’avenue où les combats se concentraient. À l’avant sur la zone de front à peine quelques milliers de combattants, puis un no man’s land de quelques centaines de mètres et enfin la masse populaire, immense, innombrable, invincible, forte d’une formidable clameur.


Encore une fois, les combats furent terribles. Quand la police tirait plusieurs salves de grenades offensives et explosives et chargeaient par centaines, la foule reculait en désordre avant que les combattants scandent un cri de guerre repris par la suite par des centaines de milliers de personnes d’une même voix peu avant que plusieurs milliers de personnes se mettent à charger les lignes ennemies fuyant en désordre.


Le temps des accalmies irréelles, durant lesquelles pendant une demie-heure les combattants se relaient sur la zone de front, se soignent à l’arrière, fument une cigarette, font tourner boissons et mallox, avec un calme et sang-froid évidents, alors que 100 mètres plus haut ça canarde violemment.


FIN DE LA SOCIÉTÉ DU SPECTACLE

Après les grands incendies, ce fut les pillages. De supermarchés, de magasins, de kiosques, et même… d’armureries. De sorte qu’à un moment de la bataille, des personnes se promenaient tranquillement avec des kalachnikov, des boucliers, des sabres, tandis que tous les revolvers et fusils disparurent presque instantanément.


La question à présent reste la suite des événements : l’armée dans les rues ? Deuxième journée d’insurrection ? Putsch fasciste ? Terreur répressive ?

Pour l’heure les occupations tiennent, et de nouvelles préfectures et mairies seraient occupées un peu partout.

Une chose est certaine : en Grèce, nous n’avons plus peur !


Faitent tourner cette info, partager la, copier la ! Il faut que le monde sache !

Publié dans Révoltes-Guerillas

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